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« le: 28 janvier 2010 à 15:16:16 »
Bonjour à tous,
suite à une demande de Luther, je vous soumets ici des règles de forge que j'ai créées pour ma table.
Elles sont en l'état non testées (on devrait commencer à le faire sous peu), et me semblent un peu lourdes - cela dit, le souhait du joueur est d'avoir un système complexe et riche pour personnaliser ses créations.
Alors voilà, pour la théorie non liée à Propchey:
Préambule:
Le fer et l'acier:
Le fer est un métal très mou à l'état pur. On le trouve dans la nature sous forme d'oxyde de fer. Il nécessite d'être chauffé dans un bas-fourneau puis éclaté en morceau, dont on fait le tri par teneur de carbone. Il est aussi possible de chauffer le métal directement à la forge, de le frapper pour libérer ses impuretés (cinglage), puis le plier à nouveau (corroyage), et recommencer. Ces deux méthodes sont celles que l'on retiendra pour Prophecy.
Le haut-fourneau, lui, permet de produire directement de la fonte liquide, éliminant les scories dans l'opération: on ajoute du silice à une gangue calcaire (ou l'inverse) pour séparer la fonte (le fer qui absorbe le carbone) des scories.
Pour obtenir de l'acier, on souffle de l'oxygène sur la fonte pour la décarburer - cette technique me semblant peu adaptée à Prophecy, on supposera que selon les régions et les minerais, l'acier obtenu sera plus ou moins concentré en carbone (ce qui sans doute correspondait à la réalité du moyen-âge).
L'acier contient de 0,025% à 2,1% de carbone (0,8% étant une teneur appropriée pour les armes).
La fonte contient de 2,1% à 6,67% de carbone.
La température de fonte dépend de la teneur en carbone.
Trouver du fer en dessous de 0,025% de carbone est très rare, même à notre époque (utilisation très spécifique).
Couleurs de forge d'un acier classique:
Rouge sombre 650°
Rouge très sombre 750°
Rouge cerise naissant 800°
Rouge cerise sombre 850°
Rouge cerise 900° T° de trempe
Rouge cerise clair 950°
Rouge cerise très clair 1000°
Jaune orange 1050°
Jaune 1100°
Jaune clair 1150°
Jaune très clair 1200°
Blanc 1300°
La forge:
En règle générale il ne faut pas forger une lame trop chaud, et surtout ne pas laisser la lame chauffer inutilement dans la forge sans la forger, dans ce cas le grain grossit beaucoup et inutilement. De plus une fois la lame chaude, le grain continue de grossir même si la température diminue.
Si on chauffe trop longtemps, ou trop fort,
les grains ont tendance à grossir.
On perd alors la "qualité de coupe" de la lame.
Forger fortement et trop froid peut provoquer des tapures ce qui est très mauvais, forger trop chaud et trop longtemps fait grossir le grain, voilà tout le dilemme.
On chauffe fort si l’on doit faire subir à l’acier des déformations conséquentes (étirage de la lame, de la soie, ou forge de la pointe par exemple). On peut chauffer assez fortement mais en travaillant toujours la lame. Ne pas la laisser chauffer inutilement ou « l’oublier » dans la forge !
Ensuite lorsque la lame acquiert sa forme et que l’on à moins besoin de la déformer, on réduit la température de forge et on tape moins fort.
La règle qu’il ressort de tout cela c’est que l’on chauffe le plus fort en début de forge, ou les déformations de la lame seront importantes (dans ce cas la le grain grossis mais on le « casse » lors des déformations importantes qu’on lui fait subir) et on chauffe moins en fin de forge, mais on tape aussi moins fort au marteau.
En fin de forge laisser la lame refroidir au noir avant de la réchauffer, pour réamorcer la cristallisation à chaque fois et donc affiner le grain.
Ici, plusieurs trempes (voir plus loin) courtes successives possibles (10 ou +) en ressortant la lame vers 700° (huile chaude mieux que eau)
Bien sur forger régulièrement, planer si besoin, et lors de la formation du tranchant forger approximativement le même nombre de coups de marteau de chaque coté de la lame.
En fin de forge, chose IMPORTANTE !
3 normalisations en chauffant à T° de trempe puis refroidissement, en balançant la lame dans l’air pour accélérer son refroidissement. C’est à ce moment la que l’on vois si la lame se déforme. Si elle se déforme c’est aussi le moment de lui faire doucement reprendre la forme désirée. A la fin de ces 3 normalisations, la lame ne doit pas se déformer. Si elle ne bouge plus, elle ne devrait pas non plus se déformer lors de la trempe.
Avant de tremper la lame, il faut enlever les tensions pour éviter que la lame ne 'gondole' lors de la trempe.
Pour cela, porter la lame au rouge 'cerise', puis, la laisser refroidir dans un matériau qui ralentit le refroidissement comme par exemple du sable fin très sec, de la vermiculite (isolant employé dans la construction de maison), de la laine de verre, de la chaux, des cendres de la forge ou autre (qui résistent à la chaleur).
Laisser refroidir entre 12 et 24 heures. Recommencer 2 fois ou plus si nécessaire.
C'est ce qu'on appelle un recuit. Ainsi le métal sera plus mou et permettra un travail plus facile à la lime.
Usinage de la lame :
On donne la forme finale à la lame à l’aide de limes. Faire bien attention à ne pas la chauffer ; si l’on est pas sur de cela ne pas hésiter à refaire 3 normalisations.
Laisser une épaisseur de 1mm minimum au tranchant afin qu’il ne se décarbure pas à la trempe. Il faut également veiller à ce qu’il n’y ai pas d’angles vifs (par exemple au départ de la soie) ou de rayures importantes (du à l’abrasif de l’émouturage par exemple) qui pourraient engendrer un départ de fissure avec le choc thermique de la trempe.
Principe de la trempe:
La trempe consiste à chauffer le métal à une température ou le carbone se dissout dans la matière, puis à refroidir rapidement pour garder cette structure a température ambiante.
Aspect technique pour bien comprendre (si cela vous semble obscur, sautez ce passage)
Prenons l'exemple d'un acier à 0.4% de carbone.
On le chauffe l'acier à 900°C, on a une solution solide homogène de fer et de carbone..
On a un certain système cristallin dit "système cubique à faces centrées".
Refroidissons DOUCEMENT
Le métal se décompose et, au milieu de la solution solide, des grains de système cristallin dit cubique centré apparaissent car la solubilité du carbone diminue.
On a un mélange de cristaux cubiques à face centrées et cubiques centrés à gros grains, de fer et de carbure de fer (Fe3C).
L'acier qui a été chauffé au dessus de 900°C puis refroidi lentement est dit recuit
car il a eu le temps de revenir à son état normal d'équilibre , ETAT le plus mou.
Refroidissons RAPIDEMENT
Si maintenant, on refroidit rapidement à partir de 900°C en trempant dans l'eau,
on a un mélange de cristaux cubiques à face centrées et cubiques centrés.
Ces cristaux n'ont pas la même densité.
La création de de grains de volumes différents dans un métal qui n'est plus très chaud, s'accompagne de distorsions des cristaux et d'efforts internes très grands.
Le métal durcit par écrouissage et ce durcissement est d'autant plus grand que la température de la transformation est basse et rapide.
Il en résulte une suite de glissements de certains plans d'atomes les uns par rapport aux autres de façon très brutale.
Dans cet état( dit martensite ), le métal a une dureté très élevée à cause des efforts internes qui sont produits. Le métal est dit TREMPE.
Le métal est fragile, et si on le laisse tomber, il donne un son très cristallin caractéristique.
En ramenant la température au dessus de 200°C (REVENU) on peut atténuer les efforts internes et réduire la fragilité de l'acier (sans revenu, des fissures peuvent apparaître plusieurs jours après la trempe - de même une trempe trop forte peut rendre le métal cassant malgré le revenu).
Si on augmente la température et la durée du REVENU, la martensite se décompose lentement pour redonner les phases normales, le métal redevient mou.( perte de l'effet de la trempe).
A retenir : en réchauffant l'acier on peut revenir à un état initial.. et si nécessaire, recommencer la trempe. (voir recuit ci dessous).
Remarque :
Pour que pour le grains restent petit, il faut dépasser la ligne 'changement d'état' de très peu et peu de temps.
Malheureusement cette ligne change de positon (hauteur) en fonction de la teneur en acier et atteint un minimum pour une teneur de 0,8% de carbone.
Donc il faut atteindre entre environ 750 et 900° suivant les aciers... et comme en général, l'amateur ne connaît pas les caractéristiques de son acier, ... le mieux est d' ESSAYER.
Comment tremper ?
Complète ou sélective, suivant les habitudes ou les utilisations des lames. Pour une trempe a l’huile, chauffer l’huile a 60° minimum. Une huile chaude est plus fluide, et donc assurera un meilleur refroidissement de la lame !
La Trempe en elle-même
Quand la lame est chauffée, elle émet de la lumière contrairement au revenu où c'est la lumière extérieure qui permet de voir la couleur.
DONC :
Pour tremper : se mettre dans un endroit assez sombre, pour bien voir la couleur du métal.
Pour faire un revenu : se mettre à la lumière du jour pour bien voir la couleur.
Essayez si possible, de toujours travailler dans la même ambiance lumineuse, pour que les résultats soient comparables et reproductibles.
Opérations sur la lame :
Laisser une épaisseur de 0.8 à 1 mm au tranchant, toujours pour éviter les déformations.
Chauffer la lame de façon aussi régulière que possible du côté du dos.
Dès que la température est atteinte, plonger la lame pointe la première dans un bassin rempli d'huile ( de vidange par exemple) à température ambiante.
Attention, l'huile peut prendre feu, mais s'éteint très vite .. pas de panique.
Prendre quelques litres d'huile. Si on en a trop peu, elle s'échauffe , perd de son efficacité pour la trempe, et peu brûler par elle même. L'incendie peut devenir dangereux.
Bien remuer jusqu'a ce que le métal soit complètement refroidit.
Après la trempe, réduire les efforts internes au moyen d'un revenu, pour cela, bien polir le métal pour voir la couleur, et le chauffer au 'jaune naissant' ( environ 220°c) ou, laisser la lame environ 1 heure dans un four de cuisine à 220°.
On peut aussi faire un revenu à la forge :
On pose le dos de la lame sur le charbon ou sur une brique chauffée au rouge, on amène le tranchant au jaune paille et le dos au bleu. On peut aussi plonger le tranchant dans l’eau et chauffer le dos au bleu.
Si vous chauffez au jaune naissant, allez-y très lentement ! Le changement de couleur n'est pas instantané. Si on va trop vite, lorsque le métal atteint la couleur voulue, il est déjà beaucoup trop chaud.
Une table indicative:
Couleur de revenu / Température en °C / usages approximatifs des revenus
jaune 210 outils de tours (très durs)
Jaune paille 220 mèches, outils de réalésage
Jaune foncé 230 couteaux (trempe dure)
ambre 240 tarauds filières / matrices
george de pigeon 250 ciseaux de coupe / tondeuses
lilas 260 haches ciseaux à bois
brun rouge 270 couteaux ( plus souples)
pourpre 280 tournevis
pourpre foncé 290
bleu 300 lame de scies à bois
bleu nuit 310
noir > 310 plus de trempe
Ce revenu est très important pour la sécurité, car trop dure, la lame peut casser comme du verre.
Testez le résultat de la trempe au moyen d'une petite lime, elle ne doit pas entamer le métal.
Si la trempe n'est pas bonne, on peut toujours faire un recuit et recommencer la trempe en changeant les températures ou les temps de refroidissement.
N.B.: Ceci est un mode d'emploi "passe partout" et non optimalisé car, chaque acier devrait être traité différemment.
En général, cette méthode donne un bon et même souvent un très bon résultat.
Par contre, certains aciers demandent un traitement tout autre.
Par exemple : un échantillon (composition inconnue) où pour pouvoir tremper il a fallu chauffer au rouge clair, puis trempé 1 seconde dans de l'eau, et laisser refroidir 12 heures très lentement dans du sable sec comme pour le recuire.
Quelques derniers conseils:
* Ne pas hésiter au moindre doute de surchauffe (après l’émouture particulièrement) à refaire 3 normalisations.
* A la place ou avant les normalisations, il est possible de faire des trempes rapides, ceci toujours pour diminuer le grain : Traitement particulièrement bénéfiques pour les aciers au chrome (dits inoxydables), et en particulier le 100C6 : Chauffer la lame à sa température de trempe et faire une trempe complète dans de l’huile. La ressortir lorsqu’elle est encore chaude (700 °c) et recommencer le processus de chauffe/trempe jusqu'à une dizaine de fois.
* Lors de la trempe il est aussi possible de faire une triple trempe c’est a dire de tremper la lame non pas 1 seule fois mais 3 fois d’affilées, soit immédiatement les unes derrière les autres, soit à 1 jour d’intervalle.
* Si une lame à bougé lors de la trempe (ce qui ne devrait plus arriver avec ces traitements ) il est possible de la redresser à froid IMMEDIATEMENT après la trempe et avant le revenu. Il faut la redresser impérativement dans les 5 minutes qui suivent la trempe, et surtout ne PAS frapper dessus au marteau mais plutot la redresser en faisant doucement levier (dans l'étau par exemple), sinon casse !
* Il est aussi possible de faire comme pour les 3 trempes, 3 revenus, l’un derrière l’autre.